28 JUIN 1669. Il y a 344 ans LOUIS XIV fonde l’OPERA FRANçAIS.

28 Juin

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http://www.classiquenews.com/applaudir/lire_article.aspx?article=1605&identifiant=20071229P454AWB7B4190VKMB5G2XP2PM

« Louis, par la grâce de Dieu, Roy de France et de Navarre, à tous ceux qui ces présentes Lettres verront. Salut. 
Notre amé et féal Pierre Perrin, (…) nous a très humblement fait remontrer, que depuis quelques années les Italiens ont établi diverses Académies, dans lesquelles il se fait des représentations en musique, qu’on nomme Opera. (…)
…Et enfin que s’il nous plaisoit de lui accorder la permission d’établir dans notre Royaume de pareilles Académies. Car tel est notre plaisir. 
Donné à Saint Germain-en-Laye, le vingt-huitième jour de Juin, l’an de grâce mil six cens soixante-neuf, et de notre Règne le vingt-septième. 
Signé, Louis, et sur le repli, par le Roy, Colbert ».

 Avec cette lettre patente du 28 juin 1669, Louis XIV ouvre officiellement la voie à l’opéra français, et en confie le privilège au poète Pierre Perrin, un français. Un choix très certainement fidèle à la volonté du roi Soleil de rayonner dans le monde avec des artistes de son pays, et pas nécessairement italiens comme ses prédécesseurs.

 Intermède.
Il faut dire que depuis le règne de François Ier, plus d’un siècle auparavant, un air venu d’Italie souffle à la Cour de France et la pousse à son tour dans le tourbillon de la Renaissance. Les souverains du royaume attirent les meilleurs artistes transalpins, élan qui s’accentue avec Catherine et Marie, nos reines de la famille des Médicis de Florence.

 C’est d’ailleurs dans la cité au lys rouge que naît à la fin du XVIe siècle la Camerata fiorentina, un mouvement culturel regroupant musiciens, poètes, chanteurs et théoriciens. Ces humanistes affirment la supériorité de la monodie grecque sur la polyphonie médiévale, et produisent des œuvres où la musique vient en simple support d’un texte qui se doit être le reflet des passions, et intelligible. Après la Dafne de Jacopo Peri en 1597 ou la Rappresentazione di Anima e di Corpo d’Emilio de Cavalieri en 1600, c’est Claudio Monteverdi avec son Orfeo de 1607 qui  produit l’œuvre la plus aboutie du genre et signe selon beaucoup le premier opéra de l’histoire.

 Le déplacement progressif des scènes du chœur des églises pour les drames liturgiques au Xe siècle au parvis des églises pour les Mystères au XIIIe siècle favorise la rupture entre le profane et le sacré dans l’espace théâtral. Une fois cette séparation acquise et dans la mouvance du retour de l’Antiquité, les Italiens vont s’attacher à adapter, ou à créer des lieux spécifiques pour les représentations scéniques.

 Si Bernardo Dovizi da Bibbiena aménage scène et décors dans le palais ducal d’Urbino pour la représentation de sa Calendria en 1513, Andrea Palladio dessine juste avant de mourir la première « salle à l’italienne » à Vicence sans en voir l’achèvement en 1585. Le teatro Olimpico s’inscrit tout-à-fait dans la logique des réflexions en vogue, mêlant des éléments du théâtre antique aux valeurs modernes, et crée le prototype des futurs théâtres ; un lieu entièrement fermé qui accueille les spectateurs sur plusieurs étages tournés en U vers la scène et les décors qui changent plusieurs fois au cours de la représentation.
Le teatro Farnese à Parme fondé en 1619 s’en inspire tout autant que le teatro San Cassiano inauguré en 1637 à Venise. Ce dernier a la particularité d’être le premier théâtre public payant, proposant l’opéra à un public plus large, et amorçant pour la Sérénissime sa très proche renommée de capitale mondiale de l’opéra.
Fin de l’intermède.

 En 1643, Le petit Louis XIV monte sur le trône de France alors qu’il n’a que quatre ans. Sa mère, Anne d’Autriche, assure la Régence en s’appuyant sur Mazarin qu’elle nomme premier ministre et « surintendant au gouvernement et à la conduite de la personne du roi et de celle de Monsieur le duc d’Anjou ».
La cardinal et parrain du petit roi prend son rôle très à cœur et s’attèle à transmettre sa passion pour les arts à un filleul très réceptif, surtout à la musique et la danse. Grand amateur de musique, Mazarin arrache Giambattista Lulli aux services de Mademoiselle de Montpensier et l’appelle à la cour. Il fait venir de son Italie natale plusieurs artistes de renom comme Francesco Sacrati, Giacomo Torelli ou Luigi Rossi pour leur faire jouer devant la cour ces pièces chantées à la nouvelle mode. Mais Louis XIV n’a que neuf ans.

 Mazarin dont le désir est d’éblouir met alors toute son énergie dans une pièce d’opéra qu’il commande à Francesco Cavalli pour le mariage de Louis et Marie-Thérèse d’Autriche en 1660. Malheureusement La Salle des Machines (immense théâtre d’une aile du Palais des Tuileries) commandée à Gaspare Vigarini, grand architecte baroque, n’est pas prête à temps. Ercole amante n’est donc jouée qu’en février 1662, un an après la mort de son mécène qui ne put voir que la magie opéra…

 A la mort de Mazarin en 1661, Jean-Baptiste Lully (il s’est fait naturaliser français et a modifié l’orthographe de son nom) est nommé surintendant de la musique royale et met au goût du jour outre des ballets de cour, des tragédies lyriques écrites par Philippe Quinault et des comédies ballets signées Molière. Chemin faisant le musicien introduit l’opéra de style français.
Sous sa tutelle et dans l’ère de la création des Académies (de peinture, des sciences, de France à Rome, etc…), Louis XIV accorde donc au poète Pierre Perrin le privilège de diriger l’Académie de musique afin de promouvoir l’opéra en langue française. C’est au jeu de paume de la Bouteille (futur théâtre Guénégaud) loué pour cinq ans, que le spectacle d’inauguration de l’Académie d’opéra a lieu, en mars 1671. Pomone composé par Robert Cambert, sur un livret de l’abbé Pierre Perrin, est donc le premier « opéra en musique et en vers françois » officiel. Les parisiens applaudissent plusieurs mois durant ce spectacle, ce qui donne bien des regrets à Lully. Cependant Perrin étant un piètre gestionnaire  on l’envoie en prison, et le musicien du Roi rachète le privilège avec l’agrément de Louis XIV et Colbert, et l’autorisation de faire jouer des pièces de musique dans d’autres langues… clause inutile puisque Lully se contente de faire jouer ses propres œuvres dans la langue de Molière, bien que les deux hommes soient désormais en froid.

 Ainsi s’ouvre la grande histoire de l’opéra qui va au cours des siècles suivants continuer d’offrir au public des spectacles éblouissants ; ravissement des décors, froufrou des costumes, frissonnement des voix éveillent tous les sens. Peinte par Edgar Degas, sculptée par Jean-Baptiste Carpeaux, racontée par Gaston Leroux, la danseuse de Stendhal ne se contente pas de divertir, non, elle tient aussi une place de choix dans la vie sociale. Source Inépuisable d’inspiration de la littérature du XIXe siècle, l’opéra est la voix de l’universalité, le décor des enjeux mondains, la scène de la comédie humaine. Ainsi vont les choses. Cosi fan tutte*

                                   Albane de Maigret

*Cosi fan tutte, opéra de Mozart de 1790

 

Les nouvelles du bottin mondain du 28 juin 2013

 

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