I. Plus on a de raisons de la prendre en grippe…
Plus elle veut qu’on l’aime.
Alors que, samedi 25 mars, les dirigeants européens » fêtaient » les 60 ans du traité de Rome, l’Union européenne (UE) est en proie à un gigantesque paradoxe : elle fait face à des contestations internes et externes d’une ampleur inédite et pourtant jamais les rapports, pro-positions et autres livres blancs visant à vanter ses mérites n’ont été aussi nombreux. C’est ainsi que, lundi 27 mars, l’institut Montaigne (jamais en reste d’eurolâtrie, a présenté à son tour sa contribution sur le sujet, intitulée » L’Europe dont nous avons besoin « . Rien de moins…
Pour mener ses réflexions, le think tank libéral a organisé un groupe de travail présidé par Ramon Fernandez, ancien directeur général du Trésor, aujourd’hui directeur général délégué chargé de la stratégie et des finances du groupe Orange (montrant ainsi les interconnexions pouvant exister entre les plus hautes responsabilités de l’administration fiscale et les finances des grands groupes industriels). Ses dix-huit membres sont essentiellement des économistes, comme Laurence Boone, économiste en chef d’Axa (mais ancienne conseillère spéciales pour les affaires économiques de François Hollande, à l’Elysée), des diplomates et des dirigeants du secteur privé, comme Bruno Deletré, directeur général du Crédit foncier de France (et auteur en 2012 d’une tribune très orientée, intitulée « Osons le fédéralisme pour sauver l’euro et notre économie »).
Leur rapport démarre sur le constat qui fait aujourd’hui consensus : il est urgent de réformer l’UE pour la sauver. Et, notamment, de renforcer son rôle de » rempart » face à la mondialisation. Encore faudrait-il que ce rempart existe…
Pour que l’Europe protège un peu plus encore les citoyens, la première priorité devrait être de renforcer la zone euro, le cœur économique de la construction européenne – quitte à opter, pour le reste, pour une UE à plusieurs vitesses. Et là, tout est dit. Les auteurs s’efforcent de démontrer qu’il est possible d’en faire plus sans aller jusqu’au fédéralisme total, option dont nombre d’Européens, attachés à leur souveraineté, ne veulent pas entendre parler. » Il est possible de réformer la zone euro dans le cadre des traités actuels, sans tomber dans des querelles institutionnelles stériles « , assure M. Fernandez. Alors, pourquoi avoir laissé faire ce gâchis pendant tant d’années ?
Comment ? D’abord, en réorientant les politiques économiques vers plus de croissance, de soutien à l’innovation et, surtout, de convergence. » Nous ne pouvons plus laisser les économies de la zone euro diverger, avec une partie des pays où les ajustements se font uniquement par une déflation interne douloureuse « , explique M. Fernandez. Alors répétons-le à M. Fernandez : » pourquoi avoir laissé faire ce gâchis pendant tant d’années ? »
Ensuite, en comblant les lacunes de l’architecture actuelle. » La plupart des critiques envers la zone euro sont en vérité le résultat de son incomplétude : une union monétaire ne peut pas bien fonctionner sans un volet budgétaire permettant d’absorber les chocs « , remarque l’ancien directeur général du Trésor. Selon lui, construire un élément budgétaire commun sans bond fédéral peut se faire dans quelques domaines-clés. Alimenté par un mélange de TVA et d’impôt sur les sociétés, ce budget pourrait financer un socle commun d’assurance-chômage, qui aurait pour avantage de soulager les pays qui traversent des phases difficiles.
En parallèle, suggère le rapport, il conviendrait de transformer le Mécanisme européen de stabilité (MES) en véritable Fonds monétaire européen, susceptible d’aider les pays confrontés à des difficultés de financement – et qui permettrait de moins faire appel au Fonds monétaire international, où les Etats-Unis de Donald Trump ont un droit de veto.
Tout cela ne fonctionnerait que si les institutions européennes devenaient plus efficaces et transparentes. Avec, par exemple, la création d’une section consacrée à la zone euro au sein du Parlement européen, proposent les auteurs. Une suggestion qui rappelle celle du candidat socialiste à la présidentielle, Benoît Hamon, qui prône l’instauration d’une » assemblée de la zone euro « , composée de députés nationaux.
En d’autre termes, moins l’Union européenne fonctionne bien et plus il faut d’intégration européenne… Ça nous rappelle le bon vieux temps du communisme, quand on nous racontait que si nous avions le sentiment que le système ne fonctionnait pas c’était parce qu’il n’y avait pas assez de communisme ! Coluche avait trouvé la formule qui résume ce type de raisonnement :
» PLUS ON PEDALE MOINS FORT ET MOINS ON AVANCE PLUS VITE ! «
Mais cette vision idyllique dépend uniquement de la volonté des dirigeants politiques. » Passé les élections dans les deux pays, le couple franco-allemand tiendra une opportunité historique de reprendre en main la construction européenne et de formuler un nouveau projet « , estime M. Fernandez. Pour rétablir la confiance brisée entre les deux capitales, explique-t-il, chacune devra faire un petit pas. A Berlin de cesser d’accumuler des excédents extérieurs excessifs, source de déséquilibres et de déflation dans le reste de la zone euro. A la France de prouver qu’elle est capable de maîtriser ses finances publiques.
Si le rapport passe en revue les autres domaines où l’UE peut également en faire plus – défense, numérique, transition énergétique –, il insiste beaucoup sur l’importance de la solidarité entre les pays membres face à la mondialisation. Il s’agit probablement du point le plus délicat : » Si les traités commerciaux de libre-échange sont souvent perçus comme une menace par les citoyens, ils peuvent contribuer à la prospérité économique. A condition que les négociations soient plus transparentes et associent plus amplement la société civile. » Ben voyons ! Qu’il nous permette alors une petite question : pourquoi ne l’a-t-on pas fait plus tôt ? Surtout s’il n’y avait jamais rien à cacher…
En vérité, tous ces gens-là voient s’écrouler leur utopie et leurs prébendes disparaître avec elle. Alors, c’est la panique et on nous promet que, demain, on rasera gratis. Mais demain seulement.
II. À vos marques. Prêts ? Partez !
Cela fait neuf mois, depuis le référendum britannique sur le » Brexit « , que les » Bruxellois » attendent l’activation de ce fameux article 50 des traités de l’Union encadrant la sortie d’un pays membre. Ils ont eu largement le temps de se préparer.
Theresa May
La lettre de la Première ministre,Theresa May, parviendra au président du Conseil européen, Donald Tusk, aujourd’hui mercredi 29 mars, à la mi-journée. Ce dernier en accusera réception officiellement dans les heures qui suivent si la missive britannique s’en tient à la position de négociation exprimée en janvier. A l’époque, Londres avait souhaité une sortie franche de l’UE, sans maintien d’un accès au marché intérieur et à l’union douanière, afin de reprendre le contrôle des flux migratoires et de se soustraire aux arrêts de la Cour de justice de l’UE.
M. Tusk reprendra des arguments bien rodés par Bruxelles : il devrait dire son dépit de voir partir un pays membre, et souligner que l’UE négociera sans naïveté mais sans esprit de revanche. Il confirmera dans la foulée la tenue d’un sommet extraordinaire consacré au Brexit, le 29 avril. Entre les deux tours de l’élection présidentielle française, ce sera l’occasion d’un ultime déplacement à Bruxelles de François Hollande : les 27 dirigeants devront s’accorder sur les principes qui fonderont leurs positions de négociation pour les deux ans que doit durer la procédure de divorce. Y réussiront-ils malgré leurs divisions exacerbées par la crise migratoire de 2015 et alors que la Pologne est ouvertement en froid avec Bruxelles ?
Sans surprise, la protection du marché intérieur et de ses quatre libertés de circulation – des personnes, des biens, des services et des capitaux – devrait figurer en bonne place dans ces principes. Tout comme la nécessité de préserver les accords de paix de Belfast de 1998 ayant mis fin à la guerre civile en Irlande du Nord, qui fait consensus à Bruxelles.
Les Vingt-Sept insisteront aussi sur leur volonté de sécuriser le sort des 3,2 millions de citoyens de l’UE présents au Royaume-Uni, et sur les engagements financiers dont Londres doit s’acquitter avant de partir. Ils pourraient enfin chercher à imposer que la discussion sur la future relation avec le Royaume-Uni ne commence qu’après la conclusion d’un accord de principe sur le divorce. Une fois les principes endossés, la Commission les traduira en mandat de négociation : elle entrera dans les détails, précisera par exemple comment calculer les sommes dues par Londres aux Vingt-Sept. Ce vade-mecum sera prêt début mai.
Quand celui-ci aura été validé par les Etats membres, en mai, lors d’un « conseil des affaires générales » auquel assistent les ministres des affaires européennes, les négociations pourront vraiment commencer.
Michel Barnier, ex-commissaire au marché intérieur, sera le négociateur en chef pour l’UE, le premier interlocuteur de David Davis, le secrétaire d’Etat au Brexit de Theresa May. M. Barnier s’est constitué une équipe d’une trentaine de fonctionnaires européens. Côté Conseil, le diplomate belge Didier Seeuws devrait être confirmé à la tête d’un groupe de travail chargé de tenir les Etats informés des discussions menées par M. Barnier.
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Les rencontres entre négociateurs bruxellois et britanniques se dérouleront surtout à Bruxelles, à un rythme très soutenu, bien plus que dans le cas des accords de libre-échange pour lesquels les équipes ne se réunissent que tous les deux ou trois mois. Personne n’a de temps à perdre : deux ans pour solder quarante-quatre ans de vie commune, c’est très court. Tous ceux qui ont divorcé en savent quelque chose.
Mais avec le Royaume-Uni, rien n’est jamais joué.
III. La France n’a plus d’argent mais elle a des idées…
Faute de gros-porteurs, l’état-major français est obligé de sous-traiter à l’étranger une partie de ses transports de troupes et de matériel. Un rapport, remis mardi 28 mars à la commission des finances de l’Assemblée nationale, pointe les fragilités » juridiques, financières et géopolitiques » de ce recours à des opérateurs extérieurs
La commission des finances de l’Assemblée nationale a reçu, mardi 28 mars, un rapport sévère du député (LR) François Cornut-Gentille, dénonçant les fragilités » juridiques « , » financières » et » géopolitiques » de l’organisation du transport aérien des armées. Pour convoyer blindés et soldats partout dans le monde, ces dernières s’appuient sur deux prestataires principaux, ICS et une agence de l’OTAN, qui mettent en œuvre des avions de gros tonnage, surtout russes et ukrainiens.
Ce document parlementaire prolonge le travail de la Cour des comptes. Dans un rapport d’octobre 2016 sur les opérations extérieures, la juridiction avait mentionné, sans investiguer davantage à ce stade, des » anomalies » dans la gestion du transport stratégique – les vols entre la France et les zones d’opérations de l’armée.
Une autre enquête mobilise la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD) sur des fuites internes. Des documents anonymes ont en effet été donnés à la presse pour dénoncer des pratiques douteuses au sein même de l’état-major. Le sujet, enfin, est traité par le contrôle général des armées. Les diverses investigations en cours pourraient déboucher sur des enquêtes judiciaires, comme le suggère lui-même le rapport Cornut-Gentille.
Avec les avions qu’elle possède, notamment ses Airbus, la France n’a couvert, entre 2012 et 2015, selon les périodes, que de 7 % à 23 % de ses besoins en transport aérien pour ses forces armées. La défense nationale ne possède aucun gros-porteur. Elle les loue, nourrissant un marché juteux d’Antonov 124, d’Iliouchine 76 ou de Bœing 747. Les affaires ont prospéré ces dernières années, avec le retrait d’Afghanistan et les déploiements au Sahel, en Centrafrique, en Irak et en Syrie. Le transport stratégique coûte au ministère autour de 160 millions d’euros par an (soit 15 % du prix des opérations extérieures). Jusque fin 2016, l’affréteur ICS a obtenu plus du tiers de ce marché. La location d’appareils à l’OTAN compte pour 35%, les avions nationaux pour 20% et les alliés de la France lui prêtent les 5% restants avec des C17. Voilà où nous en sommes !
Le soutien de l’opération » Barkhane » au Sahel, par exemple, représente sur une année 15 000 tonnes de fret et 20 000 personnels transportés. Et ce n’est pas le tout nouvel Airbus A400 M, un programme qui a pris beaucoup de retard, qui sauvera l’armée française, selon le député Cornut-Gentille : » Il ne rivalisera jamais avec les gros-porteurs comme l’Antonov 124, qui équivaut à cinq A400 M. »
Antonov 124
Le transport stratégique n’épuise, en outre, pas tous les besoins des armées. Pour les vols tactiques – c’est-à-dire d’un point à un autre d’une même zone d’opération –, la France loue d’autres avions. Elle doit pallier l’épuisement de sa flotte de Transall et de C130. L’armée utilise, notamment, des Antonov 26 et 32, mis en œuvre par une cascade d’intermédiaires, dans des conditions de sécurité parfois douteuses.
» Il y a les règles commerciales d’un côté, les impératifs des opérations militaires de l’autre, et au milieu, des courtiers prêts à tout pour faire de l’argent « , résume un ancien pilote. L’armée a recours à plusieurs entreprises pour ses vols tactiques : ICS, mais aussi Daher (un grand groupe qui a d’autres marchés de défense) ou de plus petites structures employant d’anciens militaires, comme Pegase Airdrop, Dynami Aviation, Efis Air. Certaines se sont plaintes d’irrégularités dans les marchés, » mais personne ne va au contentieux pour ne pas risquer d’être -blacklisté à l’avenir par l’armée « , explique un de ces acteurs.
Objets du rapport parlementaire, les gros-porteurs utilisés par la France appartiennent principalement à une compagnie russe, Volga-Dnepr, basée à Oulianovsk, et à une ukrainienne, Antonov Airlines, basée à Kiev. » Les Russes et les Ukrainiens ont la maîtrise de la projection de nos forces sur les théâtres extérieurs « , dénonce ainsi le député, pour qui c’est un » abandon de souveraineté occulté mais bien réel « .
Jusqu’à présent, cette situation n’a pas gêné les engagements militaires. Pour lancer l’opération » Serval » au Mali, début 2013 – avec l’incroyable volume de 18 000 tonnes de fret en un mois –, l’état-major a utilisé neuf gros-porteurs par jour. Le contrat ICS prévoyait que la compagnie d’Etat Flight Unit 224 (FU 224), une unité de l’armée de l’air russe, soit cotraitante. Elle a fourni six de ses Antonov 124, acceptant même de suspendre les activités de la défense russe durant trois semaines. Merci Vladimir !…
L’état-major dispose de deux contrats majeurs. Il achète d’abord des heures de vol (contrat Salis) – 650 heures en 2016, pour 25 millions d’euros – pour des allers-retours au départ de Leipzig, via Châteauroux, à destination du Mali ou de l’Irak. Dans ce cadre, la France, utilise surtout les Antonov 124 russes. Mais ces dernières années, l’armée a peu fait appel au contrat Salis. La Cour des comptes a même noté que « la non-utilisation, en 2015, de la totalité des heures de vol prévues via Salis, pourtant prépayées par la France, constitue une anomalie, qui aura coûté 4 millions d’euros « . L’armée a privilégié un deuxième contrat d’externalisation, en louant des avions dans le cadre d’un » marché pluriannuel à bons de commande » passé avec ICS. Le mandataire, qui a emporté ce gros appel d’offres de la défense en 2011, a été reconduit depuis.
ICS, avec des avions russes, ukrainiens, kazakhs ou biélorusses, a donné satisfaction aux armées pour sortir d’Afghanistan et engager » Serval » au Mali ou « Sangaris » en Centrafrique. L’état-major lui a donné une place éminente. Aujourd’hui, pour les Antonov 124, ICS s’appuie sur la compagnie ukrainienne Antonov Airlines. Le contrat prévoit des allers simples depuis la France. Reste que son coût fait l’objet d’estimations divergentes : l’heure de vol s’élève, selon le rapport parlementaire, de 66 000 euros à 86 000 euros selon la Cour des comptes, entre 47 000 et 57 000 euros selon ICS.
Des soupçons de favoritisme pèsent sur les choix des armées. Les services de l’état-major n’ont pas fourni de grilles comparatives, s’étonne le député Cornut-Gentille : « Les deux contrats n’ont pas les mêmes bases de coût, et rien n’est fait pour y voir clair ! C’est, a minima, de la négligence. » Son rapport note ainsi qu’à la différence des industriels de la défense, qui mettent en concurrence des prestataires à chaque transport d’armement sensible, l’état-major s’en remet à un seul. ICS déclare réaliser actuellement un vol par semaine pour les forces françaises, quelque 500 heures par an, sur Antonov 124, Iliouchine 76 ou Bœing 747.
Outre le fait que les armées recourent principalement à ICS, y compris pour des allers-retours qui ne seraient pas prévus au contrat (entraînant donc des surfacturations), l’affréteur a été reconduit, en 2015, dans des conditions critiquées. Le député évoque des » failles juridiques fortes » dans le marché ministériel.
Au-delà de ces zones d’ombre et de quelques autres, la question de la sécurité des opérations françaises se pose pour le long terme. Les Russes et les Ukrainiens règnent depuis longtemps en maîtres sur les gros-porteurs. Mais les avions vieillissent ou se font rares. Aujourd’hui, il serait impossible de lancer une opération de l’ampleur de » Serval « , faute d’appareils. Heureusement, les prochaines auront lieu sur le territoire national lorsqu’il faudra nettoyer nos casbahs !!!
Il n’existe ainsi qu’un exemplaire au monde de l’Antonov 225, propriété de l’Ukraine, seul capable d’emporter plus de 200 tonnes de fret. L’armée l’a utilisé à sept reprises au lancement de » Serval « , acceptant que cet appareil, trop lourd…détruise la piste militaire d’Istres.
Les Antonov 124, eux, restent indispensables pour transporter les matériels hors gabarit : blindés VBCI, hélicoptères Tigre et autres canons Caesar. Dans les années 2010, on comptait 27 appareils exploités par six compagnies dans le monde, sur un marché estimé à 1 milliard de dollars gonflé par la guerre d’Afghanistan. Aujourd’hui, il ne reste que 15 avions et trois compagnies. La flotte des Iliouchine 76 est, elle aussi, limitée. Seuls les modèles les plus récents, les » stage-4 « , sont autorisés à voler, soit 7 exemplaires. Les » stage-2 « , dont il reste des centaines d’exemplaires, sont interdits de vol dans l’Union européenne. La France leur accorde des dérogations, au cas par cas. Beaucoup ont été accordées au bénéfice d’ICS.
Iliouchine 76
Une solution américaine ? Les avions équivalents, les Galaxy C5, sont réservés au Pentagone, qui ne les prête pas. Au grand dam des Français, Washington réserve parfois des centaines d’heures d’Antonov 124 sur le marché, pour répondre aux énormes besoins de ses troupes. Enfin, les Bœing et Airbus civils rendent des services, mais l’absence de rampe arrière limite leur utilisation militaire.
Il faut » réfléchir à l’acquisition de gros-porteurs » pour garantir l’autonomie française, préconise M. Cornut-Gentille. Mais aussi, et d’abord, rationaliser les contrats d’externalisation. » ICS ne doit pas être le bouc émissaire facile d’un système qui est à repenser dans son ensemble « , modère ainsi le député. Selon lui, les services centraux de l’état-major, récemment réorganisés, doivent clarifier et professionnaliser leurs pratiques. Un cas de conflit d’intérêts manifeste a été découvert : un colonel, responsable des acheminements stratégiques, a été recruté par ICS sur un poste de direction, quelques jours à peine après son départ de l’armée.
Le député conclut ainsi que la » grande efficacité de l’outil militaire français » démontrée en opérations extérieures comporte une face « beaucoup moins brillante « et appelle le ministère à prendre des mesures. Depuis 2012, la défense n’a réagi à aucune des alertes parlementaires, nombreuses, sur les lacunes du transport stratégique, regrette M. Cornut-Gentille. A l’inverse, il affirme avoir senti » des pressions » lors de ce travail de contrôle, et rapporte que des officiers chargés des contrats à l’état-major ont subi des menaces.
Et si on se décidait enfin à demander des comptes au principal responsable, le ministre de la défense, Jean-Yves Le Drian, que l’on voit se pavaner auprès d’Emmanuel Macron* ?
* Histoire d’en reprendre pour quelques années d’immunité parlementaire.
Le 29 mars 2017.
Jean-Yves Pons, CJA.