Jeux Olympiques 2024 à Paris : les ennuis commencent.

20 Jan

Vous connaissez nos critiques à l’encontre de l’idée folle de vouloir organiser à Paris les Jeux Olympiques d’été de l’année 2024 (Lire « Pourquoi tiennent-ils tellement aux Jeux Olympiques de 2024? » https://conseildansesperanceduroi.wordpress.com/2017/07/12/pourquoi-tiennent-ils-tellement-aux-jeux-olympiques-a-paris-en-2024/ :  mais aussi « Les fédérations sportives guignent l’illusoire pactole » : https://conseildansesperanceduroi.wordpress.com/2017/11/08/jeux-olympiques-de-2024-les-federations-sportives-guignent-lillusoire-pactol/ ). Mais vous connaissez également nos doute quant à la seule faisabilité de la chose, malgré l’enthousiasme apparent du comité d’organisation et même des plus hauts responsables politiques :

Emmanuel Macron, Tony Estanguet et Anne Hidalgo le 11 juillet 2017. On croirait entendre Angela Merkel : « Wir schaffen das !« 

En pleine course olympique, entre le printemps 2015 et l’été 2017, les soutiens de Paris 2024 ont souvent mis en avant le dossier des transports, présenté comme bien meilleur que celui de Los Angeles. Pourtant, le sujet des lignes de métro du « Grand Paris Express » prend désormais l’allure d’un futur casse-tête pour les organisateurs.

Tandis que, mardi 16 janvier, la ministre des transports, Elisabeth Borne, a fait savoir, devant le Sénat, que « le gouvernement présentera[it] dans les prochains jours le calendrier recalé sur des bases réalistes pour tenir les délais et éviter la dérive des coûts », un rapport de la Cour des comptes, présenté le lendemain, mercredi 17 janvier, met un gros point d’interrogation devant les lignes prévues pour les JO.

Le document dresse en effet un bilan sévère des dérapages du chantier du Grand Paris Express, futur réseau de 200 kilomètres de lignes et 68 gares en Ile-de-France d’ici à 2030. Il estime que les délais pour livrer l’ensemble ne seront pas respectés et préconise de revoir l’agenda.

Parmi les raisons des dérives budgétaires de la Société du Grand Paris (SGP), l’établissement public chargé de réaliser ce réseau, la Cour des comptes pointe « l’ambitieux calendrier de mise en service et l’échéance des Jeux olympiques de 2024 ».

Le 9 juillet 2014, alors que Paris n’était pas encore officiellement candidate à l’organisation des Jeux, le gouvernement avait décidé d’accélérer le calendrier concernant la construction de certains pans du Grand Paris Express dans la perspective éventuelle de l’organisation des JO 2024 et de l’exposition universelle en 2025.

Plan des nouvelles lignes

Aux journalistes, les membres de la candidature parisienne répétaient d’ailleurs que les Jeux allaient agir comme « un accélérateur de projets », dont ceux concernant les transports, particulièrement dans la Seine-Saint-Denis (ainsi que nous l’exposions dans notre article du 12 juillet 2017). Auprès du Comité international olympique (CIO), ils ne se privaient pas d’utiliser la future extension du réseau francilien comme une arme de conviction massive« Le volet transport a été l’atout maître pour l’emporter face à Los Angeles », rappelait d’ailleurs en septembre Valérie Pécresse, présidente (Les Républicains) de la région Ile-de-France. « La prolongation de la ligne 14 et les nouvelle lignes 16 et 17 sont stratégiques pour la desserte des sites olympiques », pouvait-on lire dans la première partie du dossier envoyé au CIO. A lire la présentation du comité de candidature, c’était alors  comme si c’était déjà fait…Patatras ! Les réalités ne sont pas, aujourd’hui, au rendez-vous.

Le rapport de la Cour des comptes montre que cette accélération volontariste a posé plusieurs problèmes. D’une part, elle a créé « une tension laissant peu de marge pour la survenue d’aléas ». D’autre part, elle a alourdi sensiblement l’addition, car la SGP s’est résolue à mettre en action plusieurs tunneliers supplémentaires. Et ce que nous annoncions dès l’année dernière a mis la puce à l’oreille de la Cour des comptes : le surcoût, pour atteindre les objectifs, serait « de l’ordre de 625 millions d’euros, chiffrent les experts de la Cour des comptes, dont 300 millions d’euros ont d’ores et déjà été décidés par le directoire de l’établissement pour les lignes 15 sud et 16 ».

Pire, malgré cette hausse des coûts pour raccourcir les délais, la Cour des comptes estime que « le calendrier de mise en service des lignes 17 et 18 en vue des Jeux olympiques de 2024 est quasi inatteignable ».

Les magistrats financiers révèlent que le gouvernement était, du reste, informé du risque de non-respect du calendrier. Dans une note au premier ministre, en janvier 2017, la SGP l’ avait alerté : les études sur la ligne 17 et 18 font apparaître des dates de mise en service qui ne sont « compatibles ni avec les échéances des JO de juillet 2024, ni avec l’échéance de l’Exposition universelle de 2025 », avait-elle écrit à Bernard Cazeneuve, à moins de mettre en action plus de tunneliers pour terminer à temps. La SGP estimait le coût des tunneliers supplémentaires à 180 à 200 millions d’euros pour la ligne 17 et à 125 millions d’euros pour la ligne 18.

Or la ligne 17, qui devrait relier Le Mesnil-Amelot (Seine-et-Marne) à Saint-Denis Pleyel, où se trouvera le village des athlètes, est stratégique. Elle doit desservir l’aéroport Charles-de-Gaulle et les sites du Bourget, où sera localisé le village des médias, qui accueillera des milliers de journalistes étrangers. Et pourtant, dans un rapport remis quelques jours après la victoire de la France à Lima, le préfet de l’Ile-de-France, Michel Cadot, suggérait déjà de reporter de 2024 à 2030 la mise en service du tronçon nord de la ligne 17.

Dans ses promesses de ville candidate, Paris assurait que « 85 % des athlètes [seraient] à moins de 30 minutes de leur site de compétition ». Mais cet objectif partait du principe que tous ces travaux seraient terminés.

Les quatre sites olympiques franciliens de la candidature Paris 2024 et leur connexion au réseau de transports en commun. – Stif

En l’absence de ligne 17, il faudrait penser à des moyens de transports alternatifs supplémentaires, ce qui engendrerait « un coût très important et une complexité d’organisation très lourde », selon les mots de Tony Estanguet, désormais président du Comité d’organisation des Jeux de Paris 2024 (COJO), dont les statuts seront publiés au Journal officiel samedi 20 janvier. « C’est sûr que pour nous, cela va être une difficulté forte si certaines lignes ne sont pas livrées à temps », a reconnu Tony Estanguet lors d’une audition devant la commission de la culture, de l’éducation et de la communication au Sénat, mercredi. 

Mais pourquoi diable ne nous ont-ils pas écoutés plus tôt au lieu de se lancer dans cette folie ?…

Le 20 janvier 2018.

Pour le CER, Jean-Yves Pons, CJA.

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