Un conseil : ne soyez pas malade cet été et, surtout, évitez les services d’urgence.

28 Juin

Hippocrate

Nous ne cessons de le répéter : confrontés à une pénurie de médecins urgentistes et aux congés annuels des titulaires, de nombreux services d’accueil des urgences en France redoutent de voir leur fonctionnement perturbé cet été. Et pourtant, en plein bras de fer avec les médecins intérimaires souvent venus d’ailleurs, qui s’opposent au plafonnement de leur rémunération, les autorités n’écartent aucune piste pour répondre aux situations les plus critiques. Y compris…le recrutement d’intérimaires hors de prix ! D’où notre expression de « Razzia sur l’hosto » (à lire d’urgence !): https://conseildansesperanceduroi.wordpress.com/2018/05/24/razzia-sur-lhosto/.

En région parisienne, quinze sites – hors Paris – sont jugés  » en difficulté  » par l’Agence régionale de santé (ARS) d’Ile-de-France. Une «  enquête flash  » menée par cette préfecture sanitaire auprès des hôpitaux révèle l’ampleur du problème : au 19  juin, 531 plages de douze heures n’étaient toujours pas pourvues pour juillet, et 711 pour août parmi les quelque 76  % d’établissements ayant répondu. Ce qui représente lors des deux mois d’été près de 600 journées de vingt-quatre heures où il manquera un médecin dans un service d’urgence.

 » Ça risque de coincer beaucoup plus que les étés précédents « , alerte Christophe Prudhomme, porte-parole de l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF), qui se dit  » inquiet «  d’un  » allongement des délais d’intervention «  et d’une  » multiplication des incidents « 

A l’origine du problème : des services d’urgences de moins en moins attractifs. Parmi les hôpitaux franciliens qui ont répondu à l’enquête de l’ARS, 73 médecins urgentistes ont démissionné en  2017 contre 43 en  2015. Le nombre de postes vacants est passé de 103  en  2016 à 148 au 1er  janvier 2018. Les heures d’intérim, elles, ont doublé, passant de 15 429  heures à 33 780  heures entre 2015 et 2017. Une véritable ruine financière.

 » Il y a de plus en plus de démissions car de nombreux médecins n’en peuvent plus de faire de l’abattage et préfèrent prendre des postes mieux payés avec moins de contraintes « , témoigne Mathias Wargon, le chef des urgences de l’hôpital Delafontaine, à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis). Et moins il y a de titulaires, plus la charge de travail est importante pour ceux qui restent.

Conséquence :  » On n’arrive plus à recruter de médecins, raconte M.  Wargon. Je n’ai pas eu une seule candidature française en six mois, j’embauche des médecins étrangers par Skype.  » A  Meaux (Seine-et-Marne), l’urgentiste Thierry Teillet -regrette qu’il soit nécessaire de  » faire du bricolage, en remplissant les lignes de garde avec des gens qui manquent d’expérience « . Et même souvent…de compétence. Voilà le niveau auquel est tombé la médecine en France. Il faudrait pendre les responsables de ce gâchis.

Le phénomène touche tout le pays.  » Il y a une centaine de services en danger cet été « , évalue François Braun, le président de SAMU-Urgences de France.  » Alors qu’avant cela ne concernait que les petits établissements, des gros se signalent désormais en difficulté, ce qui nous interroge… « , ajoute-t-il.

A l’hôpital Jacques-Cœur de Bourges, la direction a jugé il y a quelques semaines les urgences dans une  » situation très préoccupante « , avec seulement huit postes occupés sur les vingt-six nécessaires. A l’hôpital de Troyes,  » on est vingt-trois là où on devrait être trente-cinq « , a récemment déclaré à l’AFP la médecin urgentiste Valéry Flipon, disant redouter un été  » absolument catastrophique «  avec  » des dizaines de trous dans le planning « .

Pour corser une situation déjà compliquée les précédents étés, des médecins intérimaires ont lancé un appel à boycotter tous les hôpitaux appliquant un décret plafonnant à 1 404,05  euros brut la garde de vingt-quatre  heures. Estimant avoir été confronté au  » mépris «  des autorités, qui ont refusé d’entamer des discussions, le syndicat national des médecins remplaçants en hôpitaux (SNMRH) a appelé au début du mois à  » durcir le mouvement «  à partir du 15  juin. Ses effets se feraient surtout sentir en Auvergne-Rhônes-Alpes et dans le Grand Est.

Pour maintenir leur service, certains directeurs choisissent de ne pas appliquer le décret et continuent de rémunérer leurs intérimaires au-dessus du tarif autorisé, notamment en payant le repos compensateur. C’est autant d’argent payé par la collectivité nationale qui s’en va nourrir les familles au village ou au douar ! Mais, comme nous le précisions hier (https://conseildansesperanceduroi.wordpress.com/2018/06/27/grand-remplacement-voici-comment-nos-medias-nous-mentent/), ce n’est que le début.

Mais les militants de La République en marche ! n’ont encore rien compris

D’autres pourraient choisir de demander aux médecins de reporter leurs congés. Certains, enfin, sont obligés de faire des choix. A Bourges, entre le 10 et le 17  mai, l’hôpital a par exemple dû fermer à quatre reprises sa ligne de service mobile d’urgence et de réanimation (SMUR), faute de médecins urgentistes pour monter dans ce véhicule destiné à traiter les urgences vitales, renvoyant les demandes vers les hôpitaux voisins. Un type de suspension qui pourrait avoir lieu dans plusieurs autres villes au cours de l’été et dont vous imaginez les conséquences.

L’hôpital de Bourges avait aussi été tenté de recourir à la réserve sanitaire, c’est-à-dire à des médecins retraités volontaires, appelés en cas de  » situation sanitaire exceptionnelle « .

Dans une instruction  » relative à l’anticipation et à la prévention des tensions dans les structures de médecine d’urgence «  adressée le 23  mai à toutes les ARS, le ministère de la santé explique pourquoi il ne faut pas trop compter sur cette aide.  » Les ressources et les compétences disponibles au sein de la réserve sanitaire, en particulier durant les périodes de congés, peuvent ne pas être en adéquation avec les besoins exprimés « , peut-on y lire.

Dans cette circulaire, le ministère de la santé rappelle que  » pour certains établissements, les mesures d’anticipation et d’aménagement de l’organisation (…) pourraient ne pas être suffisantes « .  » Se posera alors la question du maintien de l’autorisation de médecine d’urgence « , est-il écrit, notamment  » lorsqu’il existe une autre structure de médecine d’urgence en proximité. « 

A l’été 2015, la fermeture temporaire – puis définitive – du service des urgences de Valognes (Manche), non loin de Cherbourg, faute d’effectifs suffisants pour le faire fonctionner, avait suscité l’émoi parmi la population. La révision de la carte des services d’urgences, à laquelle la précédente ministre de la santé, Marisol Touraine, n’avait pas osé s’attaquer, est désormais programmée  » à l’horizon 2020 « .

Dans le meilleur des cas…

Le 28 juin 2018.

Pour le CER, Hippocrate, Conseiller à la santé publique.

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